pizza addict ft. cassidy

⊱ pizza addict.

Dernière tournée. Liberté. Sauveur des soirées arrosées, psychologue de service ou vide merde, tu déambulais dans les rues de la ville sur ton fidèle destrier de fer, héro des temps modernes, héro nocturne. Pieds à l'intérieur de l'enseigne, l'estomac creux, fatigue dans les yeux. Silence. Dernière âme à errer entre les tables, dans les cuisines et les vestiaires, la journée s'achevait. T'avais attrapé, entre ton pouce et ton indexe, un petit bout de mort. Rouleau de nicotine qui te permettait de tenir, de faire face aux longues heures, à la détresse. Appuyé contre la façade, le coeur lourd, l'esprit torturé, tu tirais quelques lattes, une, deux, trois. La fumée s'échappait, virevoltait et se perdait dans les ténèbres voyageant bien au-dessus des toits, disparaissait. Où est-ce que tu allais pieuter, ce soir ? Est-ce que seulement tu allais pouvoir trouver un coin où poser ton cul, où récupérer quelques heures de sommeil, un lieu propice à un certain abandon de soi-même, tomber dans les bras de Morphée, essayer de te reposer. Tu ne savais trop. Deux jours que tu pouvais observer le soleil pointer le bout de son nez pour quelques heures avant de s'incliner face à sa comparse glacée. Doux balai quotidien que tu pouvais observer, délicieux spectacle indépendant de ta volonté. Sonnerie. T'avais haussé un sourcil, coup d'oeil au patron, client bien tardif qui allait probablement se faire refouler. Long soupire. Ton regard se perdait à l'horizon tandis que ta cigarette se consumait dans tes mains. « Penniman. Tu t'en occupes. » Papier qui vole à tes pieds. Le boulot continuait. Regard noir, estomac qui gronde, il décidait. Rouleau éventré qui gisait sur le sol, tu l'avais achevé d'un coup de semelle avant de te mettre en marche. Pas de moteur, pas de brouhaha, quelques pas suffisaient. Quelques coups de phalanges contre le petit panneau de bois. Ton client devant toi. « Bonsoir, j'ai une pepperoni, une calzone, une quatre fromages et une flammekueche. » Sourire faiblard. Tu salivais. Quelques pas en avant, quelques minutes à attendre, courage. « ça fera trente-quatre dollars s'il vous plait. » Quelques billets, tintement de pièce entre elles, main sur ton estomac qui criait famine, t'esquissais un rictus gêné. Dernière ligne droite. « Merci, bonne soirée et bon appétit à vous. » Tu lui avais rapidement tourné le dos. Attrapant une nouvelle cigarette de ton paquet, longue nuit en perspective, boulot terminé.

⊱ pizza addict.

Effluves de bonne nourriture qui te chatouillaient le nez et faisaient frémir des papilles, tu ne pouvais poser tes yeux sur les boîtes sans en avoir l'estomac noué. L'envie de planter tes crocs dans la pâte, savourer, te nourrir, livrer n'était que torture quand seul le vide remplissait ton ventre. Il grondait, il grondait furieusement tandis que ton client allait remplir le sien. Sa voix qui avait attiré ton regard, ses quelques mots qui se cognaient à toi, il t'invitait à partager un repas, à mordre dans son dîner, manger un morceau. T'avais esquissé un sourire avant qu'il n'attrape les boîtes et ne te pousse dans son antre. Tu n'avais visiblement pas le choix, tant mieux. Sauveur d'une nuit, il te rendrait la pareille. Dressé sur tes deux jambes à quelques mètres de lui, il s'était rapidement installé sur son sofa, ouvrant une boîte de ce précieux Graal. Un appel à la rejoindre, hésitation, un coup d'oeil derrière ton épaule, t'avais finalement posé ton cul au sol attrapant une part pour l'engloutir en quelque secondes à peine. Jouissif. T'avais fermé les yeux, laissant un son de satisfaction totale s'emparer de la pièce. « T'en fais pas pour les olives elle seront pas perdues ! » Déglutition difficile, regard gêné. « Vous, je veux dire vous. » Politesse en toute circonstance, il n'était pas ton ami, il n'était pas de ta famille, client qui t'avait gentiment invité, tu te devais de garder une certaine distance. « Merci pour l'invitation, c'est vraiment cool de votre part ! » T'avais rapidement passé une main dans une serviette en papier avant de la lui tendre, un large sourire aux lèvres. « Cassidy, Cassidy Penniman, mais vous pouvez m'appeler cass, c'est plus court. » On ne t'appelait que très rarement pas ton prénom. Ton surnom bien plus simple, courait les rues et résonnait bien souvent dans la bouche des étrangers dès la première rencontre. « Elles sont tueuses les pizzas chez nous hein ! » Coup de publicité peut-être, phrase lancée au hasard sûrement, douce soirée qui s'annonçait.